Courrier Jean-Claude Gaudin Big Data sécurité

30/03/18 | Élu·e·s, Élu·e·s Municipaux

Jean-Marc Coppola

Conseiller municipal de Marseille

Jean-Marc Coppola

Monsieur le Maire,

Lors du Conseil municipal du 26 juin 2015, vous avez présenté aux élus un rapport intitulé « Opération Big Data de la Tranquillité Publique », sur lequel les élus Front de gauche se sont opposés de manière argumentée.

Presque trois années plus tard, nous ne savons rien ou presque, de l’évolution de ce projet, excepté, lors de chaque réunion du Conseil municipal, la présentation et le vote de rapports quasiment sans débat, induisant des investissements importants sur la vidéo-protection et la vidéo-verbalisation.

Cette frénésie sécuritaire nous inquiète pour au moins trois raisons.

Tout d’abord le nombre d’affaires élucidées est minime au regard de la multiplication de la
vidéo-surveillance à Marseille. D’autant que les cités populaires en sont quasiment dépourvues. Cités « abandonnées » dans lesquelles le taux de chômage explose, les discriminations progressent, la présence des services publics recule, la délinquance, les trafics et règlements de compte demeurent, inquiétant les habitants de plus en plus nombreux à vouloir déménager pour se protéger et protéger leurs enfants.

Ensuite, en s’appuyant sur l’analyse d’observateurs avertis sur les questions de sécurité et de tranquillité publique, il semblerait que la CNIL n’ait même pas été saisie par vos services pour autoriser le projet de Big Data qui pose des questions de libertés publiques.

Enfin, la mise en œuvre de cette opération se fait sans transparence, sans véritable débat démocratique, alors que les conséquences sont nombreuses, en particulier liées au fait que l’outil est développé par une entreprise privée Engie Ineo, sans garantie de protection sur l’utilisation des données récoltées.

Si j’ajoute les actes de terrorisme dont notre pays est toujours victime, comme récemment à Trèbes, l’ouverture d’un siège du « Bastion social », local d’extrême-droite prônant la haine et la violence au cœur de notre cité phocéenne, des actes de délinquances et de nuisances tellement divers qu’ils demandent des réponses adaptées et non globales, le sentiment d’insécurité ne risque pas de s’estomper, contrairement à votre ambition.

Nous vous rappelons, régulièrement, lors de nos interventions, que nous ne faisons pas d’angélisme, et que nous souhaitons et proposons des actions concrètes et efficaces pour la tranquillité publique. Une tranquillité qui passe, à notre avis, par une présence humaine formée, qualifiée, adaptée et suffisante pour prévenir, surveiller, protéger, sécuriser qui passe par l’écoute et le dialogue par et avec tous les acteurs concernés des polices, de la justice, des travailleurs sociaux et éducatifs, des associations et des représentants des habitants…

Nous ne sommes pas hostiles aux nouvelles technologies, mais elles ne doivent rester qu’une aide à l’intelligence et à l’action des personnes.

Ce n’est pas la conception que vous défendez et que vous mettez en œuvre avec une idéalisation des technologies, des investissements privés colossaux, une substitution du rôle de l’Etat sur sa responsabilité régalienne qu’est la sécurité. Etat qui, pourtant, continue d’étrangler financièrement la Ville.

Pour toutes ces raisons, je vous demande solennellement la tenue d’une séance extraordinaire de notre Conseil municipal, pour tirer les enseignements sur ce sujet sensible depuis la tenue du Conseil extraordinaire sur la sécurité du 30 mai 2011 et pour faire le point sur l’Opération Big Data, dont la mise en œuvre du projet semble, de toute façon, ne pas respecter le planning établi en 2015.

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